Reportage photo – À Novo Brdo le printemps revient toujours

Les équipes de Solidarité Kosovo se sont rendues au complexe agricole de Novo Brdo avec l’arrivée des beaux jours. L’occasion de faire le tour des infrastructures agricoles sorties de terre en 2023 grâce au financement de l’association et de discuter avec les employés et les familles bénéficiaires des programmes d’aide alimentaire.

La famille de Mila et Marija est l’une des soixante bénéficiaires du programme de serres agricoles distribuées par Solidarité Kosovo en 2023.

C’est un rituel qu’elles n’échangeraient pour rien au monde. A peine sorties du lit, Mila et sa petite sœur Marija avalent en quatrième vitesse un petit-déjeuner avant de foncer sabot en plastique au pied dans la serre familiale. Le départ pour l’école est prévu dans 15 minutes. En attendant, elles s’adonnent à leur activité préférée : l’arrosage des plants de légumes et de fruits. Tout se passe dans un silence presque religieux. Pendant que les mains de l’aîné bichonnent les plantes, les yeux de la benjamine les admirent. Il y a de quoi être fasciné par cette nature qui de jour en jour germe, évolue, fleurit et se transforme ! Mais voilà papa qui appelle, c’est l’heure de l’école. Les adieux seront de courtes durées, les sœurs promettent de revenir juste après les devoirs. En attendant, maman poursuivra l’arrosage manuelle de la serre dont la production de légumes et de fruits permettra de subvenir aux besoins du foyer.

En un an de programme, 30 000€ de serres agricoles ont été montées et installées par les hommes de Novo Brdo et du village voisin de Mogila
L’éveil au cycle de la vie: la nature est le meilleur terrain de jeu pour apprendre.

A quelques mètres de là, des ouvriers s’affairent, qui à fixer l’une des serres agricoles, qui à ériger la structure en acier d’une autre… Les bruits de disqueuse, perceuse et marteau perturbent à peine la quiétude de la campagne novo brdienne. Ce jour-là, il fait beau et flotte dans l’air comme un parfum d’été.Sous la direction de Svetlana, Directrice de la Soupe diocésaine, les hommes du village sont à la tâche pour construire quarante-huit serres dont bénéficieront autant de familles démunies des enclaves grâce au programme d’aide agricole initié par Solidarité Kosovo depuis 2017.

Sanja, employée diocésaine arrose les plants de tomates et autres légumes qui seront utilisés dans la fabrication des 2 300 repas servis chaque jour par la soupe populaire
Les serres permettent d’accroître le temps de culture et protègent les récoltes des oiseaux voraces.
Les employés du complexe agricole aménagent les entrées des nouvelles serres
Depuis 2015, Milan s’occupe des élevages laitier et bovin financés par Solidarité Kosovo.

Son sourire doux et lumineux irradie un visage marqué par le temps et le travail ardu. Il s’appelle Milan. Il travaille à la ferme laitière depuis les débuts de l’activité en 2015. Il a enfilé ses bottes d’éleveur parce que c’était une évidence en tant que fils et petit-fils d’agriculteur. Il appartient à la 3e génération d’éleveurs bovins et espère que l’un de ses quatre enfants poursuivra la saga agricole. Autant dire que c’est un passionné entre les mains de qui, les 52 vaches de la ferme sont dorlotées. Et elles le rendent bien avec une production journalière de 300 litres de lait par jour dont une partie est transformée en 150 kg de fromage quotidiennement durant la période de traite de six mois.

En ce mois d’avril, les vêlages ne sont pas complètement finis mais les premières naissances ont bel et bien sonné la fin de l’hiver. En tout cas, pour les vaches qui l’ont passé au chaud dans les stabus en attendant la délivrance. Dans un concert de meuglements, Milan distribue le foin à la fourche le foin et à la brouette. Il les rationne une par une pour « être sûre que chacune soit bien nourrie ».

Une fois à sec de fourrage, il se réapprovisionne au hangar de stockage de foin qu’il utilise en partage avec ses collègues de la ferme caprine. Ici, on entrepose jusqu’à 17000 bottes pendant la saison des foins. Sur place, Miloš , berger de profession, embarque une botte carrée pour les 150 jolies chèvres alpines et quelques boucs qui composent le cheptel.

Le veau qui vient de naître est l’objet de tous les soins et de toutes les attentions.
Grâce à une aide de 25 000 € allouée par Solidarité Kosovo, ce parc à fumier a été construit en 2023. Il sert à stocker le lisier qui sera épandu sur les champs pour les fertiliser. Svetlana, directrice de la soupe diocésaine, rapporte que les engrais de ferme sont un élément essentiel de la fertilité des sols, à court terme par leurs effets fertilisants, à plus long terme par leurs effets matière organique.
Les infrastructures du complexe agricole de Novo Brdo permettent de stocker du maïs et du foin pour nourrir les animaux.
La ferme alpine est le premier bâtiment construit sous l’égide de Solidarité Kosovo, en 2013
Trente six employés travaille à la ferme de Novo Brdo. Ce sont des Serbes de la région qui peuvent ainsi vivre des fruits de leur labeur

Agriculture artisanale et solution durable

Construit pas à pas depuis onze ans, la ferme de Novo Brdo est un petit coin de paradis autonome. En faisant le choix d’un élevage diversifié – vaches laitières, bovins et chèvres- et en introduisant la polyculture –fourrage et céréales-, elle s’est progressivement inscrite dans un système de production auto-suffisant et résilient.

100% de l’alimentation des bêtes d’élevage est cultivé sur place. Idem pour la transformation de la production grâce aux ateliers de fromagerie, laiterie. Dernier bâtiment sorti de terre en 2023, l’atelier de fabrication d’ajvar, cette savoureuse purée de poivrons traditionnelle. Une partie de la production artisanale est distribuée aux familles, une autre est livrée à la soupe populaire et le reste est vendu en directe grâce au magasin du diocèse. Les recettes des ventes participent au financement des emplois de la ferme. La boucle de l’autonomie est ainsi bouclée.

« Prendre soin des outils de travail »

A Novo Brdo, vous l’aurez compris, tout se recycle, rien ne se perd. Pas même les engins et l’idée vient de lui. Igor est un as de la mécanique agricole. Les tracteurs, motoculteurs ou moissonneuses-batteuses n’ont pas de secret pour lui. Employé agricole, il a soumis une proposition à Svetlana, Directrice de la Soupe Diocésaine : créer un atelier de réparation pour engin agricole sur place. Économe, l’idée a plu et s’est concrétisée. Depuis, Igor est devenu réparateur sur site.  Il ne sort de son hangar que pour tester les engins agricoles qu’il prend plaisir à repérer lui qui est mécanicien de profession mais pour qui « l’école de la débrouille » a été la plus formatrice.

Financé à hauteur de 15 000 € par Solidarité Kosovo, l’atelier de réparation a pu être construit directement à la ferme de Novo Brdo permettant un gain de temps et d’argent considérable.
Au centre du complexe agricole, une table protégée par un auvent comme on en trouve souvent au Kosovo offre un endroit paisible pour boire un café, recevoir les visiteurs ou profiter d’un moment de répit à la fin de la journée
Grâce au nouveau hangar, les tracteurs ne seront plus garés à l’extérieur où ils subissaient les intempéries et étaient la cible de vols.
L’atelier de réparation est bien équipé et sert autant pour la ferme de Novo Brdo que pour les Serbes du voisinage.
C’est dans cette chambre froide que sont entreposés les bocaux de légumes pasteurisés dont ceux remplis d’ajvar issus de l’atelier artisanal construit en 2023 grâce au financement de l’association d’un montant de 19 000 €.