La tension monte au Nord du Kosovo

La tension est à son comble en ce moment au Kosovo, où le pouvoir de Pristina multiplie les provocations, notamment dans la partie nord, majoritairement serbe. Du côté de Belgrade, le ton commence à se durcir peu à peu. Les Serbes du Kosovo, eux, craignent de se retrouver à nouveau au cœur d’un conflit…

Le 20 septembre au matin, plusieurs colonnes de blindés « Humvee », offerts à Pristina par les USA, se sont dirigées vers les postes administratifs du nord du Kosovo. À leurs bords, des membres de la police spéciale du Kosovo, la ROSU, équipés de fusils d’assauts, de gilets pare-balles et de casques lourds. Une véritable expédition militaire prenant pour prétexte une simple opération administrative de contrôle des plaques d’immatriculation des véhicules franchissant les passages administratifs, mais dont le véritable objectif était de tenter d’imposer l’autorité de Pristina dans cette zone nord qui échappe depuis toujours à son contrôle. Cette zone majoritairement serbe, où les communes sont dirigées par des élus serbes et où aucune église et aucun monastère n’a été détruit — une exception au Kosovo —, est une véritable épine dans le pied des autorités autoproclamées du Kosovo, qui cherchent depuis toujours à la réduire au silence.

Une accalmie de courte durée

La riposte ne s’est pas fait attendre : en quelques heures, des dizaines d’habitants du nord du Kosovo-Métochie étaient sur place aux postes administratifs et bloquaient le passage dans les deux sens pour protester contre cette décision injuste. Ils y resteront jusqu’à la mi-octobre, dormant sous la tente alors que les températures commençaient déjà à baisser, bientôt rejoints par des Serbes venus d’un peu partout ailleurs au Kosovo. On craindra pendant plusieurs jours un pourrissement de la situation, finalement des négociations tenues à Bruxelles viendront faire redescendre la pression, en forçant les unités de la police spéciale du Kosovo à quitter le nord.

On a donc pu croire que les choses étaient, sinon rentrées dans l’ordre, au moins apaisées. Hélas, les troupes de la ROSU ne sont pas restées bien longtemps éloignées du nord du Kosovo : le 13 octobre, toujours harnachées et armées comme si elles partaient sur un front particulièrement chaud, elles pénétraient à nouveau la zone serbe, notamment à Mitrovica. Objectif officiel de l’opération cette fois-ci : « lutte contre la contrebande ». Un motif qui ne peut que faire rire jaune quiconque connaît un peu le Kosovo, paradis pour les trafiquants en tout genre. La cible principale de cette opération : les stocks, déjà mal approvisionnés, de plusieurs pharmacies serbes…

Un soutien explicite de la Russie

Là encore, la réaction des Serbes de Mitrovica a été rapide : en quelques dizaines de minutes, ils étaient des centaines dans les rues pour protéger leurs pharmacies. La ROSU a riposté d’abord en lançant des grenades lacrymogènes — qui ont provoqué la mort d’une femme âgée chez elle —, puis, à Zvecan, en tirant à balles réelles. Plusieurs Serbes ont été blessés, dont un gravement. À l’heure où nous écrivons ces lignes, il est encore à l’hôpital, même si ses jours ne sont plus en danger.

En Serbie centrale aussi, la réaction à cette agression a été rapide et claire : Aleksandar Vucic, président de la République de Serbie, s’est rendu en urgence à Raska, au sud de la Serbie, pour rencontrer des représentants des Serbes du Kosovo… et passer des troupes de l’armée serbe en revue. Avec des paroles fortes : « Nous ne laisserons pas un nouveau pogrom comme celui de mars 2004 se produire ». Lors du premier épisode de violences, le même Vucic avait reçu un soutien explicite de l’ambassadeur de Russie, qui s’était personnellement déplacé à l’un des postes administratifs concernés.

De quoi rassurer les Serbes du Kosovo ? Pour l’instant, ils craignent plus de se retrouver au cœur d’un conflit dont personne ne peut savoir ce qu’il sortirait… et dont ils auraient de toute façon à souffrir.