Ce n’est pas un convoi tout à fait comme les autres qui a débuté ce 26 décembre. Alors que nous étions en route pour le Kosovo, en provenance de Belgrade, nous n’avons pas pu passer le poste administratif à cause du renforcement de dernière minute des mesures sanitaires.
Une fois le choc de cette nouvelle inattendue passé, notre réaction a été rapide et efficace. En contact étroit avec l’évêque du Kosovo-Métochie Monseigneur Théodose, et le président de Solidarité Kosovo Arnaud Gouillon, notre équipe se rend alors dans la zone nord du diocèse du Kosovo-Métochie situé administrativement en Serbie centrale (à l’extrême nord du Kosovo). Grâce à Milovan de notre bureau humanitaire de Gracanica et avec le soutien des prêtres des paroisses environnantes, notre équipe élabore en urgence un nouveau plan de distribution de l’aide humanitaire. Il a été décidé que le père Serdjan et nos volontaires serbes déjà présents au Kosovo distribueraient les poêles à bois et les cadeaux dans les enclaves comme initialement prévu, tandis que notre équipe de bénévoles français étendrait l’aide de Solidarité Kosovo aux familles les plus démunies dans la partie nord du diocèse, dans la région de Novi Pazar.
Dans cette zone à 95 % musulmane, les conditions de vie sont rudes et les habitants ont besoin de toute l’aide que l’on peut leur apporter.
Nous avons donc pris la direction de l’église de Novi Pazar où étaient entreposés des cartables, du matériel scolaire ainsi que des paquets cadeaux remplis de friandises que nous allions distribuer dans les écoles et dans les familles.
Premier arrêt à Vranovina, un village d’une cinquantaine de maisons dont l’école accueille à peine onze enfants. Après que Milovan a présenté l’association aux enfants, nous leur avons donné à chacun un cartable rempli de matériel scolaire et un paquet de friandises. Les élèves étaient timides, mais derrière les masques nous pouvions voir se dessiner leurs sourires.
Alors que nous nous rendions au village suivant, nous nous sommes arrêtés sur le bord de la route, à Kovačevo. Nous avons improvisé une halte à l’école Ratsko Nemanjitch, un prestigieux personnage historique plus connu sous le nom de Saint Sava, le fondateur de l’Église orthodoxe serbe, pour remettre à ses dix-sept élèves les mêmes présents qu’à leurs camarades. Le directeur nous a expliqué avec fierté qu’il s’agit de la seule école du pays qui porte le nom de naissance du saint, fils de Stefan Nemanja, le premier roi de Serbie. Moins réservés, les enfants ont échangé des plaisanteries et ont comparé avec fierté les colis reçus.
Enfin, nous sommes arrivés en avance à Šaronje, où nous avons attendu la fin des cours pour rencontrer les élèves. Dans cette école trop petite pour le nombre d’enfants qu’elle accueille, les plus jeunes vont en classe le matin et les plus grands les remplacent dans les locaux l’après-midi. Cette fois encore les masques n’ont pas pu effacer les sourires, parfois hésitants, ni étouffer les remerciements des écoliers et de leurs enseignants.
Ému, le père Ivan nous a confié que notre passage laisserait des traces. Il a souligné la résilience des habitants de la région qui veulent à tout prix rester vivre sur la terre de leurs ancêtres. « Revenez nous voir ! » nous a-t-il dit, pour tous les enfants et les familles qui se démènent chaque jour avec courage et dignité.
Un peu plus tard, alors que nous nous préparions à livrer des poêles à bois, nous avons appris que notre camion était bloqué dans les rues de Novi Pazar qui se préparait à accueillir le président de Serbie Aleksandar Vucic. Finalement, nous avons réussi à récupérer un poêle avant que la nuit tombe et à le livrer à Daniel Bijorac, un jeune éleveur de porcs. Cela aura été non sans mal car il a d’abord fallu désembourber son tracteur et l’équiper d’épaisses chaînes pour éviter qu’il s’enlise à nouveau. Un défi relevé avec succès et le jeune homme est reparti installer son nouveau poêle, assurant à sa famille le confort d’une maison bien chauffée lors des rudes hivers.
Comme vous pouvez le voir, la situation sanitaire, les conditions climatiques et les autres aléas qu’un convoi humanitaire international comporte ne nous ont pas simplifié la tâche. Mais une des forces de notre association est de savoir rebondir après les coups durs. C’est grâce à l’expérience et aux excellentes relations nouées par Solidarité Kosovo avec les populations locales ainsi que les autorités ecclésiastiques que nous pouvons apporter efficacement notre aide aux habitants de cette région qui en ont tant besoin.