Solidarité Kosovo mène depuis dix ans une campagne annuelle de rénovation d’écoles serbes, laissées à l’abandon depuis les pogroms de 2004. Cette année cinq établissements ont bénéficié de ce programme rendu possible par la générosité des donateurs de l’association.
L’accès à l’éducation pour tous les enfants serbes figure en bonne place des nombreuses difficultés que rencontrent au quotidien les chrétiens au Kosovo.
Aller à l’école relève parfois du parcours du combattant, surtout dans les enclaves les plus isolées. Certains enfants doivent marcher plusieurs kilomètres en montagne, faute d’avoir un établissement dans leur village ou un système de ramassage scolaire. En hiver, les chemins tortueux sont à peine praticables, bloqués par la neige ou la boue, s’ajoutant au manque de moyens des familles pour acheter du matériel scolaire.
Enseigner et apprendre dans des conditions drastiques
En pénétrant dans la cour de cette école perdue dans la montagne, entourée par de grands sapins avec une vue à couper le souffle, on ne peut que se réjouir pour les enfants de bénéficier d’un tel cadre d’apprentissage. Les fresques colorées et joyeuses peintes sur les murs renforcent cette impression. Mais en passant la porte, on se rend compte que quelque chose ne va pas. C’est même un miracle qu’elle tienne encore debout ! Dépourvue de planche en bas, la porte laisse passer l’air glacé, qu’elle soit ouverte ou fermée. On sent sous les pieds les bosses d’un sol de terre battue recouvert d’une mince couche de lino.
Dans l’unique salle de classe, quatre petites filles, sages comme des images, répondent avec enthousiasme à leur professeure. Les murs sont recouverts de dessins et de leçons illustrées. Dans un coin, un vieux poêle dispense un peu de chaleur à condition d’aller régulièrement chercher du combustible.
La pièce attenante, assez grande pour accueillir une trentaine d’élèves, n’a plus de carreaux aux fenêtres. Sur son plancher défoncé, on stocke le charbon et le bois de chauffage. Le tableau noir qui tient toujours au mur et quelques pupitres encore alignés lui donnent des allures de salle de classe fantôme.
La maîtresse fait de son mieux pour offrir à ses élèves les meilleures conditions possible pour étudier en apportant un peu de matériel sur ses propres deniers, mais elle ne peut évidemment pas réparer les trous dans les murs ou la toiture, ni changer le système électrique ou la plomberie. Double symptôme de l’abandon des Serbes du Kosovo à leur triste sort, on n’entretient plus les écoles qui se vident inexorablement, soit faute d’enfants, soit parce qu’elles sont devenues trop dangereuses pour y étudier en toute sécurité.
De lourds travaux pour rénover les écoles
Chaque année depuis dix ans, Solidarité Kosovo finance la rénovation de trois ou quatre écoles à hauteur de 110 000 €, ce qui représente près de cinquante établissements pour plus d’un million d’euros !
Et il n’en faut pas moins compte tenu de la nature des travaux à réaliser. Chaque école ou crèche est sélectionnée sur des critères de vétusté et d’insalubrité.
À la rentrée prochaine, les élèves de l’école primaire Vuk Karadzic à Kmetovac seront à l’abri du froid et de l’humidité après que les menuiseries ont été changées, que l’électricité a été refaite, que les sols ont été remplacés, tout comme les sanitaires, pour un budget de 30 000 €.
À Mogila, les enfants auront bien chaud à l’intérieur grâce au nouveau système de chauffage et pourront s’amuser dehors en toute sécurité dans la nouvelle aire de jeux pour un budget de 32 000 €. Cela inclut la construction d’une nouvelle salle pour accueillir plus d’élèves, ce qui est toujours une bonne nouvelle.
À Skulanevo, les enseignants n’ont plus peur que le ciel leur tombe sur la tête en plein cours car le toit a été complètement rénové. Une chaufferie a été installée et la plomberie a été entièrement refaite, le tout pour 20 000 €.
À Partes, les enfants de la crèche « Colibri » ont reçus de nouveaux jeux et jouets tandis qu’à l’école primaire de Gornji Kusc a pu faire le plein de matériel pédagogique et de fournitures scolaires.
Indépendamment des problèmes d’hygiène et de sécurité que représentent pour les élèves des bâtiments fortement dégradés, rénover les écoles jusque dans les enclaves les plus éloignées est aussi une façon de lutter contre le déclassement des Serbes au Kosovo.
Étudier pour construire son avenir
Pour survivre, un peuple doit préserver ses racines, ses traditions et son histoire. Au Kosovo, l’école est avec l’église le dernier bastion de la transmission de la mémoire et de la culture serbes. C’est bien pour cela qu’elles sont fréquemment la cible d’attaques, allant des invectives aux graffitis sur les murs en passant parfois par l’agression d’élèves à la sortie de leur école.
Pour les jeunes des enclaves qui ne connaissent que les tensions, voire la violence, dans leur quotidien depuis leur plus jeune âge, l’école doit être un refuge, un lieu sûr pour apprendre, s’amuser et se sociabiliser.